On entend souvent cette affirmation, très relayée à droite notamment mais le discours que l’on peut trouver à gauche n’est parfois pas très loin non plus (après tout dépend de quelle gauche on parle, là je pense au PS). C’est issu de la théorie « classique » de l’économie, très prisée par le néolibéralisme depuis 50 ans environ.
Pourtant, saviez-vous que les impôts étaient bien plus élevés sur les tranches supérieures durant les trente glorieuses ? Maintenant on est traité de communiste si on souhaite les relever, pourtant c’est bien pendant les années de gloire du capitalisme que les impôts étaient les plus forts ! Cet article va rapidement traiter cette idée reçue (les impôts sur les riches font du mal à l’économie), qui fait probablement d’assez gros dégâts de nos jours.
On a un exemple en temps réel avec le covid
Je vais traiter de ce sujet en prenant un simple exemple d’actualité : la crise du covid. En effet en touchant l’Occident à partir de Mars 2020, le covid a eu de nombreuses conséquences qui commencent à peine à se faire ressentir à l’heure où j’écris ces lignes (Décembre 2020). Il y a eu tout d’abord un krach boursier (et c’est ce que vous entendrez le plus dans les médias). Mais c’était prévisible et en fait on s’en fout, car les banques centrales inondent d’argent gratuit la finance (avec le QE) donc il n’y a pas vraiment d’impact à ce niveau. A part d’un point de vue confiance dans l’avenir peut être, on reviendra dessus plus bas...
Mais le plus gros impact, c’est les confinements et l’effondrement de la consommation. Puisqu’on ferme les magasins et bars pour éviter les contaminations. Et notamment la seconde vague fin 2020 qui aura fini de tourner le couteau dans la plaie déjà bien ouverte avec Mars et Avril.
En effet les licenciements de masse et faillites de boîtes en tout genre commencent à peine à arriver. Nous allons voir le chômage exploser en 2021, c’est mathématique. Pourquoi ça et pourquoi seulement maintenant ? Parce que les états ont tout fait pour adoucir la (vraie) crise et la retarder avec des aides à tout va, surtout durant le premier confinement. Sauf que ces aides ne font que remettre à plus tard certaines faillites car elles ne couvrent pas toutes les charges, et on ne peut pas aider à l’infini les entreprises sinon on obtient beaucoup d’inflation à terme. Evidemment que des boîtes seront sauvées par ces aides, et c’est tant mieux, mais pour beaucoup ça ne suffira pas.
Pourquoi ça ? Tout simplement parce que les gens ne consomment plus ! Lors des déconfinements il y a eu une grosse reprise évidemment, mais dans la pratique les gens sont restés méfiants et ont réduit leurs sorties car le virus est toujours présent etc. La consommation reste donc plus faible qu’avant-crise. On a les chiffres des deux côtés : l’INSEE nous confirme que la consommation est plus basse d’environ 14% et les livrets bancaires ont fait le plein cette année particulièrement plus que les autres (d’après l’article, en fin d’année 90 milliards de surplus pour 100 milliards habituellement mis en épargne, c’est donc le double !).
Les conséquences ? Puisque les boîtes font beaucoup moins de chiffre à charges constantes (loyers, fournisseurs et surtout salaires), elles sont obligées de licencier pour survivre, augmentant le chômage. Ce qui implique une réduction des revenus des ménages et ainsi la consommation dans un cercle vicieux – quoiqu’en France nous en sommes plutôt protégé à court terme grâce à 2 ans de chômage assurés dans cette situation, aux dépends de la dette publique donc. Au cas où, je rappelle que consommation des ménages = chiffre d’affaires des entreprises ! D’un point de vue macroéconomique les dépenses des uns – y compris de l’état – font les revenus des autres évidemment, il n’y a pas d’argent qui disparaît ici.
Vidéo vraiment géniale à ce sujet, l’économie au niveau macro expliquée en 25 minutes avec en bonus le déroulement de la crise de 2008 :
Moins de consommation = moins de chiffre d’affaires = plus de chômage
Où est-ce que le fait de baisser ou monter les impôts sur les riches à un impact ici ? Il n’y en a aucun, mais genre 0 absolu. C’est bien beau de trouver plus ou moins facilement du financement pour une entreprise, mais si derrière il n’y a pas de consommation c’est impossible de rembourser et il faut licencier. Vous aurez beau lever des dizaines de millions (accessibles à travers des impôts faibles) pour créer un besoin révolutionnaire à la Apple avec les smartphones, vous n’aurez personne en face pour acheter car tout le monde sera cloîtré chez soi, ou tout le monde sera morose et gardera des réserves « au cas où ». Comment rembourser l’investissement, c’est-à-dire la dette ? En licenciant...
Et là c’est du point de vue du secteur secondaire, mais nos économies occidentales sont majoritairement tertiaires, il est encore plus difficile de consommer dans un bar fermé par l’état il me semble ! Et c’est sans compter le fait que l’on croule déjà sous l’épargne, en France 5.000 milliards rien que dans les livrets ! Plus de 2 fois le PIB. Des livrets qui rapportent de moins en moins au fil des années, devinez pourquoi ?
Donc voilà, si de temps en temps la fameuse loi « des impôts élevés sur les riches créent du chômage » est fausse, alors la loi est fausse tout court. C’est le principe de tout théorème mathématique, une démonstration qui montre qu’il ne fonctionne pas à un seul moment implique au strict minimum que la corrélation n’est pas causalité (et de toute façon je me répète c’était confirmé durant les 30 glorieuses). Je ne dis pas forcément que la causalité est donc l’inverse, à savoir que le chômage est directement lié à la consommation, mais on l’a vu c’est au moins parfois le cas. Donc serait-ce la somme des deux ? Il y a de l’idée mais c’est en fait un peu plus que ça.
Le vrai facteur en lien de cause à effet avec l’économie : la confiance dans l’avenir
Le vrai facteur celui duquel tout découle ? La confiance dans l’avenir. Lors d’un krach boursier il y a perte de confiance des investisseurs. Lors de confinements et d’un virus qui circule, il y a perte de confiance des consommateurs. Voilà la clé.
En effet baisser massivement les impôts en assurant que ça va faire redémarrer l’économie peut fonctionner, car ça redonne confiance dans l’avenir. Et en effet remonter les impôts alors que la plupart des gens sont convaincus que ça va faire augmenter le chômage, ne va pas donner confiance dans l’avenir. On est pile dans le cas d’une prophétie auto-réalisatrice. Tout dépend du discours de base donc, celui duquel nous sommes majoritairement tous convaincus, actuellement : « augmenter les impôts ça fait du mal à l’économie ». Je me répète encore c’est faux.
Baisser les impôts momentanément peut donner un boost à court terme, c’est bien ce qui nous a sorti des crises dues aux chocs pétroliers des années 70, mais il y a aussi des impacts à long terme : l’endettement massif des états car il n’y a plus assez d’argent qui rentre. Ou encore l’augmentation des inégalités, ce qui est un facteur de perte de confiance dans l’avenir (car il est lié à une augmentation de l’insécurité entre autres). Bien évidemment je ne dis pas que tout impôt est bon et que le communisme c’est la vie, le secteur public doit faire face à ses problématiques de gaspillage (sauf que l’argent est gaspillé comment ? D’un point de vue macro il ne fait que changer de main, il est donc « rendu » non ?). Mais là n’est pas le sujet.
Conclusion : il est temps d’inverser la vapeur et de taxer les riches de nouveau
Dans notre situation actuelle avec des dettes gouvernementales abyssales, il faudra bien aller chercher de l’argent où il y en a : chez les riches. D’ailleurs apparemment 70% du surplus d’épargne de 2020 en France est issu de 20% des ménages… Il nous faut donc avant ça convaincre les populations qu’augmenter les impôts ne fera pas de mal à l’économie ! Cet exercice est parfaitement faisable, après tout nous sommes tous convaincus actuellement de l’inverse alors que ce n’était pas le cas il y a 70 ans.
D’ailleurs on constate aux Etats Unis un changement de discours depuis quelques temps de la part de millionnaires et milliardaires ! Mais il est encore très marginal, et en France on fait l’exact inverse actuellement (ISF et « exit tax »). La volonté politico-médiatique Occidentale ne semble en effet pas présente… serait-ce parce que c’est eux qui y perdraient le plus ?...